
Chaque année depuis 1991, l’Afrique et la République Démocratique du Congo célèbrent la Journée de l’Enfant Africain (JEA), une occasion cruciale de placer l’enfant africain au cœur des discussions. Cette année, la célébration revêt une importance particulière, avec un thème continental axé sur la « Planification et budgétisation des droits de l’enfant : progrès depuis 2010 ». Au niveau national, les autorités congolaises ont décliné ce thème en se concentrant sur l’allocation et l’exécution effective des budgets alloués à l’enfant congolais.
L’Enjeu Crucial de la Budgétisation Sensible aux Droits de l’Enfant
La situation des enfants en République Démocratique du Congo révèle des défis majeurs en matière d’éducation, de protection et de santé, comme en témoignent l’Enquête Démographique et de Santé (EDS) en République Démocratique du Congo 2023–24.
Éducation : Des obstacles persistants
Les statistiques de l’Unicef disent que 8 enfants sur 10 fréquentent régulièrement l’école primaire (83 %). Au niveau secondaire, ce chiffre chute considérablement, avec seulement environ 53% de fréquentation nette. Cette situation est encore plus critique en milieu rural, où le taux tombe à 42,3%. Le niveau de bien-être économique constitue un facteur déterminant. Ainsi, au primaire, le taux net de fréquentation scolaire atteint 87,9 % dans le quintile le plus élevé de bien-être économique, contre seulement 75,3 % dans le quintile le plus bas. Les inégalités sont encore plus marquées au niveau secondaire : 75,8 % dans le quintile le plus élevé contre seulement 35 % dans le quintile le plus bas. Par ailleurs, d’autres facteurs structurels et sociaux continuent d’entraver les performances dans ce secteur.
Protection : Violences et vulnérabilités généralisées
Selon l’Unicef, la protection des enfants est gravement compromise. À peine 3 enfants sur 10 (29,7 %) disposent d’un acte de naissance, privant ainsi des millions d’enfants d’une identité juridique et de l’accès aux services essentiels. 1enfant sur 10 (11,9 %) est soumis à un travail économique ou domestique excessif, un taux qui dépasse les 20 % dans certaines provinces. Les violences domestiques restent largement répandues : selon les données de l’enquête MICS-Palu 2018, 8 enfants sur 10 (88,8 %) sont exposés à au moins une forme de discipline violente.
Santé : Des lacunes critiques
Le domaine de la santé infantile présente également des faiblesses préoccupantes. Seuls 21 % des enfants âgés de 12 à 23 mois ont reçu l’ensemble des vaccins de base, un taux largement en deçà des engagements internationaux. La mortalité infantile demeure élevée, avec un taux de 56 pour mille naissances vivantes. Par ailleurs, dans les deux semaines précédant l’enquête EDS III, 60 % des enfants ont présenté une toux persistante ou des symptômes respiratoires, 20 % des enfants de moins de 5 ans ont eu de la fièvre et 14 % ont souffert de diarrhée.
La JEA 2025 met en lumière une vérité fondamentale : sans les moyens nécessaires à leur mise en œuvre, les résolutions et les textes sur les droits de l’enfant ne restent que de simples intentions. La budgétisation sensible aux droits de l’enfant est la clé de voûte de toute amélioration des conditions de vie des enfants. Elle englobe non seulement la planification et l’allocation des fonds, mais surtout leur exécution rigoureuse et transparente.
Un élément central et incontournable de cette budgétisation est la paix. La paix est la condition sine qua non pour garantir la réalisation de tous les objectifs que le Gouvernement et ses partenaires se sont fixés pour les enfants congolais.
Paix et Droits de l’Enfant : la situation alarmante de l’Est de la RDC
- Une éducation en ruines : des milliers d’écoles fermées ou détruites Les violences grandissantes dans l’Est de la RDC ont engendré la fermeture et la destruction massive d’écoles. Selon le ministère de l’Éducation, 2 594 établissements scolaires sont actuellement fermés dans les provinces du Nord et du Sud-Kivu, privant près de 1,1 million d’enfants d’accès à l’école reddit.com aa.com.tr . Par ailleurs, UNICEF signale que plus de 2 500 écoles et espaces d’apprentissage ont été rendus inaptes ou occupés, affectant 795 000 enfants rien qu’en février 2025. Cette destruction systématique compromet gravement l’avenir de toute une génération.
- Enfants exposés à la violence, au recrutement et aux abus sexuels La crise ne se cantonne pas à l’éducation : les enfants sont exposés à des formes de violence extrêmes. À North Kivu, environ 375 000 enfants sont déscolarisés et vulnérables, parmi eux beaucoup risquent d’être enrôlés par des groupes armés . UNICEF rapporte une hausse de 150 % des violations graves envers les enfants (meurtres, abus sexuels, recrutement) depuis janvier 2025 dans le Sud-Kivu. Plus intensément encore, un rapport de l’ONU dénonce des cas de viols sur mineurs, notamment 572 incidents en une seule semaine, dont 170 enfants victimes . Des statistiques glaçantes qui dévoilent l’usage généralisé de la violence comme arme de guerre contre les enfants.
- Disparités régionales et aspirations d’une gouvernance responsable Les crises humanitaires frappent différemment les deux provinces. Le Nord-Kivu concentre une fermeture de 775 écoles (17 % du total), avec plus de 62 000 enfants directement affectés par des attaques sur des établissements scolaires. Au Sud-Kivu, plus de 1 000 écoles sont fermées, mettant en danger plus de 300 000 élèves et exacerbant les déplacements, avec 850 000 personnes contraintes de fuir, dont près de la moitié sont des enfants Selon save the children.
- En cette journée dédiée à l’enfants africain, l’OGDH-RDC appelle les autorités nationales et internationales à assumer leur responsabilité : protéger les enfants, garantir leur accès à l’éducation, et sanctionner les violations des droits humains. Sans une gouvernance rigoureuse et respectueuse du droit international, ces enfants risquent de sombrer dans un futur marqué par la violence, l’ignorance et l’exploitation.